Une partie de plus en plus large de la population est maintenue à sa place - sous la ligne de flottaison donc - par un système répressif toujours plus dur : ainsi on parle de drones pour surveiller le nouvel an, de renforcement policier et d’amendes bien bien punitives : si vous êtes tenu responsable d’une fête au nouvel an, ça vous en coûtera jusqu’à 4000 euros. Plusieurs mois de salaire de la grande majorité des auteurs de bande dessinée.

Signalons la participation d’auteurs et d’illustrateur au projet #deputesdelahonte

Alors que le gouvernement se veut le défenseur de la liberté d’expression, il restreint avec cette loi les libertés et l’expression journalistique et citoyenne.
Nous, auteurices de bande dessinée, avons décidé de rendre visibles celles et ceux qui ont voté cette loi dans l’urgence, alors que le pays est en plein confinement.

Parmi ces auteurs, qu’on salue pour ce travail, pas mal dont on a chroniqué les bouquins, et qu’on a même reçu dans ce studio, comme Lucie Castel, Morvandiau, Robin Cousin, pas le temps de les citer mais on est fier d’eux.

Signalons aussi un texte récent de PACÔME THIELLEMENT, qui sur son blog, rage sur la décision française de permettre les rassemblement de Noël, une fête communautaire :

Le Noël moderne, c’est une fête dont la coutume unique consiste à raconter un mensonge à un gosse. C’est tout. C’est un rituel d’apprentissage pour entrer dans un monde de déloyauté extrême où l’on découvre que même nos parents sont capables de nous mentir sciemment pendant des années. C’est le rituel d’apprentissage pour faire partie d’un monde dont l’équilibre réside dans le fait que ceux à qui on a menti mentiront à leur tour. C’est l’allégorie d’un monde où les enfants sont dupés et, en grandissant, deviennent dupeurs. C’est le symbole de notre servitude éternelle aux dieux du mensonge et de la manipulation. On ne sera jamais libre tant qu’on n’aura pas effacé jusqu’au souvenir de Noël de cette Terre.

Décidément 2020 est une année politique. 2021 devrait l’être aussi, on en fait le voeu.

On avait entamé un cycle d’interview de Benoit Crucifix le mois passé, mais le temps nous a manqué ce mois ci. On continuera ça le mois prochain, c’est promis. Mais nous avons un invité tout de même

Les nouveautés

Stéphane parle du petit Bald Knobber de Robert Sergel chez Huber éditions

Benoit parle de l’imposant Rusty Brown de Chris Ware chez Delcourt.

Top à deux de l’année écoulée

On a eu envie de lire tout de même, malgré le moral bas. Évoquons quelques titres.
Stéphane
Catégorie old friend : Clyde Fans de Seth chez Delcourt : 20 ans de travail en écoutant de la musique des années 40 pour ce livre froid et touchant à la fois.
Catégorie politique : Kent state, quatre morts dans l’Ohio de Derf Backderf chez Ça & Là. Dans les moments troublés que nous vivons, Backderf revient sur un événement de 1970, la mort de 4 étudiants qui secoua tout un pays et a eu des conséquences politiques majeures. On a besoin de ce rappel : il est possible de produire des changements de grande magnitude à partir de luttes sociales fortes. Mais Backderf nous rappelle que ça coûte des vies, malheureusement.
Prix histoire : Voyages en Égypte et en Nubie de Giam­bat­tista Belzoni. Troisième voyage le dernier Belzoni de Lucie Castel, Grégory Jarry et Nicole Augereau, nominé comme les deux premiers par le festival d’Angoulême, on espère que celui-ci sera le bon. Un fourbe du 19e siècle, un petit aventurier qui se dépatouille dans la lutte pour l’exploitation de l’égypte entre la France et l’Angleterre.
Prix réédition pour Paracuellos de Gimenez. Un livre témoignage glaçant sur les orphelinats franquistes.
Prix narcisse : Michel et le grand schisme de Pierre Maurel. Double narcisse puisque c’est un livre de l’employé du Moi et que j’en ai assuré le suivi. Si vous n’avez pas lu un des trois tomes de Michel, faites-le : ça parle de la France, de la politique répressive et la middle class qui essaie de survivre.

Benoît
Préférence Système de Ugo Bienvenu, publié en 2019 chez Denoël Graphic mais seulement arrivé dans ma bibliothèque en 2020, et l’histoire d’une mère porteuse robot qui essaie de protéger de la surveillance généralisée un enfant qu’elle a porté. Album qui m’a surtout fait découvrir Ugo Bienvenu dont Paiement accepté sorti en 2017 m’a encore plus plu et dont le B.O. comme un dieu, qui lui est bien paru en 2020, n’est pas le moins jouissif des BD culs éditées par les Requins marteaux.
Bolchoi Arena par Boulet et Aseyn, une série dont le deuxième tome est paru en 2020 chez Delcourt : une histoire dans un futur où les frontières entre le jeu vidéo et le monde réel sont encore plus poreuses qu’aujourd’hui, où entertainment et politique sont presque devenus synonyme. Avec une héroïne comme actrice principale, dans ce monde de mecs, une histoire qui tient en haleine.
Du côté manga j’ai commencé la série Mauvaise herbe de Keigho Shinzo, surtout connu pour Tokyo Alien Brothers, publié chez Le Lézard noir sur la rencontre un peu cliché entre un inspecteur de la brigade des moeurs à Tokyo et une jeune fille qui lui rappelle sa propre fille décédée et qui se prostitue pour survivre. Ce résumé qui sent l’eau de rose et/ou le mauvais roman porno de gare est en fait en livre tout en douceur.
Et pour finir si vous cherchez encore un cadeau à mettre sous le cadeau de Noël pour votre beau-père ou votre neveu boutonneux, prenez Slasher de Charles Forsman publié chez l’Employé du Moi. Vous êtes sûr d’avoir des discussions autour d’un des albums les plus trashs et déprimants que je connaisse. Ame sensible s’abstenir comme dirait l’autre. Et prenez la version traduite dont la couverture est beaucoup plus réussie que celle choisie par Floating World Comics en anglais.

L’interview : Julian Huber, des éditions Huber

Julian Huber a fondé avec Baptiste Neveux les éditions Huber. Il y a publié 9 titres en 5 ans, et de nombreux produits dérivés, car il finance ses livres par du crowdfunding, et que ce qu’on appelle les “compensations” passent par des poster, des sérigraphies signées, etc.
On parle de bande dessinée américaine, de financement alternatif, du travail de représentant en bande dessinée avec lui.