Radio Grandpapier

Autour de Dominique A.

La musique de Dominique A. surgit dans les années 90’. Le désenchantement, la déconstruction de l’économie des rapports amoureux, la conscience malheureuse, tout ça participe d’une résistance à la montée en puissance de la bien-pensée du village global, de la joie consumériste autour notamment de la chute du mur de Berlin, l’époque post guerre froide. Une courte période jubilatoire faite de bulle internet et de nouvelles technologies de la communication qui s’arrête lorsque le monde se re-polarise, après le 11 septembre. “Je me sens comme une allumette humide dans un feu de forêt” aurait-il pu dire. mais à la place, Dominique A. a susurré “Que dis-tu d’un ménage à trois ?”

Adjustement

Ian Mackinnon est un jeune animateur anglais, qui livre avec "Adjustement" un étrange récit sur l’obsession amoureuse à travers le prisme du dessin ou plus précisement du flip book.
Le site web de cet artiste est riche et touffu, nous vous conseillons de l’exporer.

Vivian Maier

La photographie est un médium plastique pauvre, accessible et peu spectaculaire dans sa pratique : un appareil photo et un magasin de photo à proximité suffisent. Cette particularité permet de voir surgir des auteurs inconnus de manière régulière. Ainsi, il y a quelques années, Vivian Meir, une “street photographer” née 1926 et morte en 2009, a été découverte par pur hasard par un collectionneur, à l’occasion dans une vente aux enchères, intrigué par le bric-à-brac d’une vieille dame juste placée à l’hospice. Des tirages et des milliers de négatifs, que l’homme a commencé à ausculter pour y découvrir un témoignage du Chicago des années 60-70, mais aussi une photographe douée et discrète. 100000 photographies, dont 30 à 40000 sous forme de rouleaux non développés.

On citera aussi Garri Winogrand, un bouffeur de réel. Le “street photographer“ par excellence, regardant sans juger mais avec avidité les corps se déplacer dans la lumière tranchante des grands boulevards. Son livre "Women are beautiful", est un chant d’amour à la beauté des femmes ordinaires, celles que l’on suit des yeux, que l’on frôle, et qui rendent les grandes capitales moins insupportables.

Robert Frank enfin, pour son errance désabusée et les moments fugaces de plaisir qu’il saisit en traversant l’Europe puis les états unis, avant de finir sous une couette dans les froides contrées canadiennes. Un de des derniers livre, "Thank you", compile des photos et cartes postales qui lui ont été envoyées, autant de caresses à cette énorme figure de la photographie d’après guerre, dont la fragilité nous touche.

Kent Rogowski

Avec sa série Bears, Rogowski montre des ours en peluche retournés comme des gands, inside-out. Leur nature industrielle apparait cruement, loin du design mignonnet que leur surface externe propose en magasin. La simplicité du procédé et la beauté clinique du résultat en font quelque chose de bouleversant.

Adrian Tomine

La chanson et la bande dessinée mêlent un contenu plutôt sémantique (le texte, les paroles) avec un continuum plus sensoriel (la musique, le dessin), pour faire émerger émotion et sens par leur fusion. L’écriture de chanson est cependant un genre très spécifique, différent de la littérature. Adrian Tomine, cet auteur américain aux origines japonaises, nous a semblé proche de l’univers de Dominique A. Son attention particulière a des émotions ténues, qui surgissent au détour d’une activité quotidienne, dans la précision d’une situation anodine, est présente dès ses premiers fanzines photocopiés (il débute jeune, à 17 ans) et monte en puissance avec le comics "Optic nerve". Des récits courts, de 1 à 6 planches, campent des situations très précises et très variées (vieille dame mangeant des tartines, jeune fille accompagnant un aveugle au supermarché), une palette d’émotions douce-amère d’une grande subtilité. Nous recommandons "Insomnies", qui reprends des récits courts issus de "Optic nerve".

On citera aussi Daniel Clowes pour l’amertume de cet auteur américain, perceptible aussi bien dans ses premiers comics “LLoyd LLewellyn” que dans son “Dan Pussey”. Plus doux avec Ghost World, il reste cependant agité par la médiocrité de la vie aux states. Ses portraits en quelques planches sont d’une grande finesse d’observation.