Aujourd’hui je vais vous parler d’une sorte de parenthèse enchantée dans l’histoire du livre en Russie, et plus particulièrement de celui qui est considéré comme le père fondateur du constructivisme, Vladimir Lebedev. Cette période de quelques 15 années, de 1920 à 1935 va connaître un développement fulgurant dans le domaine du livre d’images. Après la révolution d’octobre, un vent nouveau souffle sur la Russie, le régime soviétique encourage les artistes à expérimenter de nouvelles formes d’expression (au début du moins) . Le livre se démocratise, il n’est plus réservé à la classe dominante, les auteurs, sous l’impulsion de la révolution s’adressent maintenant aux enfants du peuple, dans un langage simple, proche du réel. La longue tradition des contes de fées est reniée, les nouveaux auteurs se détournent du style décoratif et ornemental du début su siècle (on peut citer les contes russes illustrées par BIlibine), pour aller vers une géométrisation et une simplification des formes. Le rapport à l’enfant connaît aussi un changement majeur, au lieu de peupler son imaginaire d’êtres irréels, les nouveaux auteurs vont chercher à développer son autonomie, son emprise sur le monde, son penchant pour l’exploration. Tout ça dans la glorification des thèses soviétiques en place. Pendant quelques années le livre jeunesse deviendra un laboratoire pour les artistes d’avant-garde, avant que le vent ne tourne et que le pouvoir en place ne mette fin à cet âge d’or dans sa quête de contrôle absolu.